PICASSO

PICASSO

Extrait du livre :

Les nouvelles versions ou les réinterprétations picturales de ce tableau montrent comment l'oeuvre d'un artiste a pu devenir le motif d'une iconologie populaire dans laquelle le «Zeitgeist» devait trouver son expression. C'est ainsi qu'au début des années cinquante, Picasso devait marquer l'image de toute une génération avec les portraits d'une jeune femme du nom de Sylvette David, ses déformations créatives transformant un objet trivial alors à la mode, la fameuse queue de cheval, en signe distinctif de toute une époque (repr. p.519).

Seules les sérigraphies de personnalités célèbres (Marilyn Monroe, Jacqueline Kennedy, Elvis Presley) réalisées par Andy Warhol devaient avoir un impact équivalent sur les mentalités. Comme aucun autre artiste du vingtième siècle, Picasso ne fut pas seulement omniprésent par ses oeuvres, il fut et demeure lui-même un des thèmes majeurs de la culture de masse. Avec son absence de profondeur spatiale, le petit tableau de jeunesse, «L'enfant au pigeon» (repr. p. 12) est une stylisation de la pose enfantine. La reproduction en masse a figé ce tableau en un modèle de grâce et d'innocence naïve. Il devint même célèbre au point d'entrer dans le mode coloré de la bande dessinée. Et lorsqu'en 1961, François Truffaut tourne «Jules et Jim», rien ne lui semble plus propre à carac­tériser la conscience culturelle de l'intellectuel européen d'avant-guerre que les tableaux de Picasso. C'est ainsi que les héros du film jouent devant des repro­ductions de Picasso dans certaines des séquences importantes de ce récit filmé.